Les Réseaux Sociaux d’Entreprise à travers trois ouvrages récents (3/3)
L’année dernière, sont parus trois livres sur les réseaux sociaux et leur mise en œuvre :- Les réseaux sociaux numériques d’entreprise par Ziryeb MAROUF chez L’Harmattan ;
- Les réseaux sociaux d’entreprise par Anthony PONCIER chez Diateino ;
- Le réseau social d’entreprise par Alain GARNIER et Guy HERVIER chez Hermes Lavoisier.
Le réseau social d’entreprise par Alain GARNIER et Guy HERVIER
Ce livre a été réalisé par Alain GARNIER, co-fondateur de JAMESPOT ainsi que conférencier sur le domaine du numérique, et Guy HERVIER, rédacteur en chef du magazine d’information en ligne InfoDSI. Il fait deux cent cinquante pages avec deux annexes, une bibliographie et un index. Il est découpé en huit chapitres regroupés en trois parties.
En introduction, les auteurs décrivent les différents types de réseaux sociaux et positionnent les réseaux sociaux d’entreprise (RSE) dans la droite ligne des ERP des années 1990 et du CRM des années 2000.
Ce livre est un ouvrage très documenté et complet sur les RSE mais dont les différents chapitres n’ont pas la même valeur ajoutée pour les différents types de lecteur.
C’est ainsi que l’analyse détaillée de l’arrivée des réseaux sociaux sur le Web (chapitre 1) et la présentation des contraintes sur les entreprises pour déployer « l’effet réseau » (chapitre 2) sont de faible valeur ajoutée pour des professionnels en charge de mettre en œuvre un RSE).
A l’opposé, les deux chapitres finaux « Démarrer un projet » (chapitre 7) et « Conduite du changement et management » ( chapitre 8 ) ont tout à fait leur place pour des praticiens mais il faut bien constater que la manière dont les sujets sont traités est malheureusement bien loin de leur titre comme cela est expliqué plus bas.
Au final, ce sont les chapitres du cœur de l’ouvrage, de 3 à 6, qui sont les plus intéressants.
Une présentation et une analyse détaillée du contenu de l’ouvrage sont réalisées ci après, partie par partie.
Contexte d’émergence et positionnement des réseaux sociaux d’entreprise
Quatre chapitres sont rassemblés dans cette partie :
- L’irruption des réseaux sociaux dans le web ;
- L’entreprise, un réseau social naturel ;
- Le réseau social d’entreprise ;
- Le réseau social d’entreprise et le système d’information.
Le premier chapitre présente un historique de l’arrivée des réseaux sociaux dans le monde de l’Internet et expose une analyse de Facebook et Twitter. Par ailleurs, les réseaux sociaux professionnels LinkedIn et Viadéo sont étudiés.
Deux analyses sont particulièrement intéressantes dans ce chapitre. La première explique le développement rapide des réseaux sociaux par l’évolution de l’Internet devenu plus accessible grâce à de nouveaux outils et le déploiement du haut débit ainsi que par la mécanique de développement d’un réseau social (effet boule de neige). La seconde s’interroge sur la pérennité des réseaux sociaux. De fait un réseau social qui met à plat tous les réseaux d’une personne (personnel, familial, professionnel…) va rencontrer ses limites. Pour la plupart des personnes, leurs différents réseaux ne communiquent pas dans le monde réel alors que sur un réseau social ils le font.
Le second chapitre positionne puis analyse les contraintes sociales, économiques, managériales qui pèsent sur les entreprises ainsi que la pression des clients pour les amener à utiliser toujours plus « l’effet réseau ».
Deux questions s’imposent à ce niveau : Est-il nécessaire dans un tel livre d’étudier l’évolution de la dynamique structurelle des secteurs d’activité ? Comment est-il possible de s’exprimer sur les réseaux sociaux dans les entreprises sans évoquer le travail qu’ont réalisé les sociologues sur ce sujet depuis de nombreuses années (sociométrie) ?
Le troisième chapitre présente les réseaux sociaux d’entreprise dans leurs différents aspects.
La définition des RSE qui est proposée par les auteurs est basée sur celle des réseaux sociaux de Wikipédia et se présente de la manière suivante : « Ensemble des individus qui prennent part à une activité d’un business et dont on matérialise dans le numérique les interactions sociales autour de cette activité afin de l’améliorer ». Cette définition semble curieuse car elle se positionne en dehors de tout contexte métier, organisationnel, fonctionnel, informatique… d’une entreprise qui dispose déjà de dispositifs et d’outils sur ces différentes dimensions.
Par ailleurs, le positionnement des RSE par rapport aux autres outils web 2.0 qui est présenté et la description qui en est faite est assez classique. C’est ainsi qu’elle manque de retours d’expérience alors que ces derniers outils sont utilisés dans les organisations depuis déjà de nombreuses années.
S’agissant de la présentation de la gouvernance qui est faite à la suite, elle est pour le moins déroutante parce que l’on y présente plutôt les types de réseau, leurs utilisateurs avec leurs rôles et les problématiques juridiques que vraiment la mécanique de gouvernance à mettre en œuvre pour accompagner le déploiement d’un réseau social d’entreprise.
Concernant les fonctionnalités d’un RSE et en particulier celles présentées par les auteurs, un autre billet du blog va y être consacré.
Le quatrième chapitre expose la position des auteurs concernant la place des réseaux sociaux d’entreprise dans le système d’information des organisations et en particulier par rapport au mail, l’Intranet, la bureautique, le site web, l’ECM, le CRM, l’ERP, BI et le moteur de recherche.
Il est certain que cette question est essentielle, cependant la manière dont elle est traitée ne semble pas tout à fait avoir la perspective qu’il faudrait lui donner. En effet les auteurs expliquent la manière dont le RSE doit s’intégrer dans le système d’information. Mais les différents composants d’un système d’information ne sont pas fixes et peuvent intégrer des fonctions « sociales ». Ce qui est de plus en plus le cas. Au final, il manque une réelle vision d’architecture du système et du positionnement que doivent prendre les fonctionnalités apportées par les RSE, séparées ou intégrées dans les outils métiers, dans le système d’information d’une organisation.
Cas réels de mise en œuvre et outils logiciels de RSE
Cette partie rassemble les deux chapitres suivants :
- Cas d’utilisation de RSE dans les entreprises ;
- Panorama des éditeurs.
L’analyse du second chapitre de cette partie ne va être réalisée dans ce billet mais dans un autre billet du blog.
S’agissant des cas d’utilisation de RSE dans les entreprises, en fait les auteurs en présentent sept sur des thématiques très variées :
- Amélioration des échanges informels ;
- Animation d’équipes ;
- Soutien à l’innovation ;
- Réalisation de la veille ;
- Partage d’expertise ;
- Renforcement de la collaboration.
Chaque cas est étudié de manière détaillée avec les rubriques suivantes :
- Entreprise ;
- Secteur ;
- Environnement général ;
- Défi ;
- Solution retenue ;
- Mise en œuvre ;
- Résultats obtenus.
Même si la mise en forme des différents cas, très détaillée, ne favorise pas l’appropriation des éléments à retenir, il faut bien constater qu’il s’agit là d’une base de retours d’expérience sur la mise en œuvre des RSE dans les organisations qui est très intéressante.
Par ailleurs, les auteurs abordent de manière plus synthétique différents autres cas à travers l’analyse des opérations réalisées dans différents secteurs (assurance, banque, service informatique, PME) ainsi que la mise en œuvre du réseau « plazza » chez Orange. Ce qui est là aussi à valeur ajoutée.
Mise en œuvre des RSE
Dans cette partie se trouve les deux chapitres suivants :
- Démarrer un projet ;
- Conduite du changement et management.
Du point de vue de la mise en œuvre d’un RSE et plus globalement de tous les projets ayant un impact sur les modes de fonctionnement et les comportements des collaborateurs, il est très judicieux d’aborder de manière séparée la gestion de projet de la conduite du changement. Il aurait sans doute fallu ajouter aussi la gouvernance à mettre en place pour la réalisation du projet et le déploiement de la conduite du changement ainsi qu’ensuite pour le fonctionnement opérationnel.
Concernant le premier chapitre, les auteurs abordent différents sujets dont certains relèvent typiquement de la gestion de projet comme la définition de ses objectifs mais d’autres plutôt de la conduite du changement comme le la fixation du sponsorship, la définition et la réalisation de la communication et de la formation…
S’agissant du second chapitre, les auteurs abordent de nombreux sujets très intéressants comme l’Entreprise 2.0, la génération Y, les questions juridiques, les règles de participation au RSE ainsi qu’à travers la citation d’une étude du cabinet IDC les règles pour maximiser les règles de succès de la mise en place d’un RSE. En fin de compte à part peut-être ce dernier point, il n’est pas question de conduite du changement mais plutôt de prendre la mesure du changement des comportements et modes de fonctionnement qui va être amené avec la mise en place d’un RSE. Cette première approche d’analyse d’impacts est certainement intéressante mais ne peut suffire lorsque l’on prétend d’exprimer sur la conduite du changement.
En conclusion, les auteurs soulignent que les réseaux sociaux dans leurs différents types vont prendre de plus en plus de place dans le grand public comme dans les organisations. Ils vont amener des changements notables de comportements comme de modes de fonctionnement professionnels qu’il va falloir gérer. Ils précisent à juste titre de plus que nous n’en sommes qu’au début de cette transformation d’ampleur qui va se conjuguer avec celle du déploiement de la nomadisation.
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Crédit photo : © Julien Eichinger – Fotolia.com
Votre article est vraiment intéressant ; le livre que vous présentez également. Je partage votre point de vue : le plus intéressant dans tout cela, ce sont les retours d’expérience sur la mise en place des RSE dans les organisations. Dans cette même optique, je vous suggère une visite sur le site de la communauté TALA.
Il s’agit d’une communauté réunissant tous les utilisateurs de la solution TALA ; celle-ci allie des services de visioconférence, des outils collaboratifs de travail et des outils de gouvernance. Les retours d’expérience des utilisateurs de cette solution sont pertinents à divers égards.
Tout d’abord parmi les utilisateurs de TALA, on retrouve de nombreuses structures de l’économie sociale ; celles-ci apprécient notamment l’utilisation des technologies libres jugées cohérentes avec leurs valeurs solidaires. Ensuite, on retrouve également des professions libérales qui jusqu’alors n’avaient pas les moyens d’acquérir une solution professionnelle qui soit à la fois « abordable » et « ouverte ».
Aussi ce qui est vraiment passionnant à étudier ce sont, d’une part, les interrogations des utilisateurs face aux nouveaux outils collaboratifs ; d’autre part la manière dont les utilisateurs s’approprient ces technologies au travers des activités d’animation de la communauté.
Si ces thématiques vous interpellent, je vous recommande ce site : (inscription à la communauté requise pour accéder à toutes les informations)